Voyage aérien/handicap: changer d’accompagnant, impossible !

juin 13, 2023 / Comments (0)

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Alors qu’Air France impose un accompagnateur à certains de ses passagers handicapés, la compagnie n’offre pas la possibilité de changer son nom en cas de désistement, ce qui arrive de plus en plus souvent. Une absurdité dénoncée par un voyageur.

Février 2023. Kevin Fermine réserve les billets d’avion pour un voyage prévu, sept mois plus tard, au Canada. Il choisit Air France. Atteint d’une infirmité motrice cérébrale (IMC) et voyageant en fauteuil roulant, le Toulousain de 31 ans pense être à l’abri des déconvenues avec la compagnie aérienne nationale. Mais le voyage en « absurdie » ne fait que commencer. Au moment de déclarer son handicap, Kévin découvre qu’Air France lui impose un accompagnateur, règle à laquelle il se plie. « Pour la sécurité des passagers en situation de handicap, un accompagnateur peut être exigé par Air France. Il a pour seul rôle de les assister en cas de situation d’urgence, et tout particulièrement en cas d’évacuation de l’avion », est-il indiqué sur son site. Soit. Encore faut-il aller au bout de la logique et accorder à cet accompagnateur un véritable statut, avec un « tarif préférentiel », comme le réclame Kévin. « Le fait de contraindre à s’acquitter d’une place plein tarif constitue une discrimination », explique-t-il dans un courrier adressé au service client de la compagnie. Mais l’incohérence ne s’arrête pas là…

Solution : racheter un billet plein pot

Trois mois plus tard, l’accompagnateur de Kévin lui fait faux bond. Un détail pour le trentenaire qui pense pouvoir simplement changer le nom de ce dernier sur le billet. Or le service d’assistance « Saphir » de la compagnie lui répond que c’est impossible. Les seuls cas autorisés : les fautes de frappe ou les changements d’état civil. Contacté par nos soins, le service communication d’Air France reste campé sur sa position, pour des raisons « historiques ». Leur solution ? Racheter un autre billet « plein pot » avec le nom du nouvel accompagnateur. « C’est totalement incompréhensible a fortiori lorsqu’on sait que le secteur de l’aide à la personne traverse en ce moment une crise sans précédent, avec un énorme déficit en personnel et des démissions à tout va. Il est donc très difficile, voire impossible, de planifier l’organisation d’un voyage pour une personne handicapée longtemps à l’avance », s’agace le jeune homme. « Sans cette condition particulière, le risque est immense pour la personne de ne plus pouvoir du tout voyager », complète-t-il.

Même situation à la SNCF

Des difficultés qui ont un goût de déjà-vu… En janvier 2023, nous évoquions le cas d’un autre voyageur en situation de handicap, Chouaieb Nemri, client cette fois de la SNCF (Lire : SNCF : impossible de modifier le nom de l’accompagnateur!). « Mon aidante avait un problème personnel qu’il m’était impossible de prévoir. Mais ça arrive souvent que les aides à la personne soient retenues sur l’une de leurs missions et donc contraintes d’annuler leur voyage en train », précisait-il. Egalement sollicité par Handicap.fr, le service SNCF Voyageurs avait, en substance, formulé la même réponse que son homologue aérien : « Le problème n’est pas spécifique aux personnes en situation de handicap et aucune évolution n’est prévue à court terme ».

Quid des autres compagnies ?

A y regarder de plus près, cette immuabilité des billets d’avion semble répandue dans la plupart des compagnies aériennes. Chez Transavia, les conditions de modification du nom de l’accompagnant sont les mêmes que pour les autres passagers, à savoir 50 euros par nom. Même politique chez Vueling. Du côté de British Airways, la rigueur est également de mise. La compagnie britannique offre une période de réflexion de 24 heures pendant laquelle il est possible d’annuler la réservation et de recevoir un remboursement complet. Passé ce délai, il faut annuler la réservation d’origine et en faire une nouvelle pour le nouveau voyageur (aux prix des billets en cours).

Air Canada comme exemple ?

Air Canada semble, en revanche, plus souple. « Si vous voulez changer de personne de soutien avant le voyage, communiquez avec les services de santé d’Air Canada au moins 48 heures avant le départ et nous nous en occuperons gratuitement », est-il indiqué sur son site. De plus, l’accompagnateur peut voyager gratuitement (hors taxes aéroportuaires), mais seulement à bord des vols intérieurs. « Un autre programme existe pour les vols entre le Canada et les Etats-Unis qui permet d’obtenir une remise de 50 % pour l’accompagnateur », apprend-on sur le blog Handilol.

Des actions au plus haut niveau ?

A quand la même politique en France ? Le ministère délégué aux Personnes handicapées répond que « l’amélioration de la qualité des services d’assistance aux voyageurs » figure parmi les mesures annoncées lors de la Conférence nationale du handicap et, ce, dès 2023. Sans se prononcer précisément sur cette situation très spécifique, il ajoute « vouloir que les opérateurs de transports accompagnent mieux les voyageurs en amont, pendant et après leur voyage » et assure que « les difficultés rencontrées lors de la réservation sont un point de vigilance partagé avec le ministère des Transports ».

De son côté, Philippe Mouiller (LR), président du groupe d’études Handicap au Sénat, s’est engagé à prendre cette affaire au sérieux, soit en travaillant sur une proposition de loi si elle est d’ordre législatif, soit en engageant des discussions avec le ministère des Transports si elle est d’ordre réglementaire. De son côté, Kévin Fermine a saisi le Défenseur des droits et lancé un contentieux contre Air France « pour que les choses évoluent ». Décollage immédiat… ou pas ?                   

« Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Clotilde Costil, journaliste Handicap.fr »


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