Fauteuil roulant à la porte de l’avion, salle de change pour les personnes lourdement handicapées… A l’occasion des Jeux de 2024, les aéroports de Paris se sont dotés de dispositifs nouveaux pour mieux accueillir les voyageurs à mobilité réduite.
Par Catherine Fay-De-Lestrac
Quelque 4 400 athlètes en situation de handicap sont attendus à Paris pour les Jeux paralympiques, auxquels s’ajoutent les spectateurs handicapés. Les compagnies aériennes vont devoir transporter et aider à débarquer des milliers d’athlètes en fauteuil roulant, dont certains emportent, en soute, des équipements spécifiques, lourds, encombrants, fragiles, souvent non pliables : handivélo, fauteuil pour le rugby et le basket… Des équipements qui coûtent parfois des dizaines de milliers d’euros.
Un règlement européen pour pérenniser ?
Pour répondre aux demandes des associations, Groupe ADP (Aéroports de Paris) et Air France ont accepté un défi logistique : amener le fauteuil roulant personnel à la porte de l’avion. « Cela demande des investissements matériels et humains importants », affirme-t-on chez Air France, qui opère la moitié des vols à Roissy. Une gageure : il faut qu’aux aéroports de départ et de correspondance, le fauteuil ait été rangé en soute de façon à être facile à dégager, sans être mêlé aux autres bagages. Paris 2024 a ainsi envoyé des étiquettes aux délégations pour identifier ces fauteuils. « Nous avons discuté pendant un an avec quelque 200 compagnies aériennes et nous l’avons obtenu pour les Jeux. Mais pour que cela soit pérenne, il faudrait un règlement européen s’imposant aux compagnies », explique Antoine Vigario, responsable accessibilité d’ADP pour les Jeux.
Amener le fauteuil à la porte de l’avion…
Le 28 août, jour d’ouverture des Jeux paralympiques, la délégation paralympique italienne atterrit à Roissy. Sur le tarmac, un assistant de la compagnie aérienne récupère un fauteuil et le transfère à un agent de l’aéroport qui le mène à travers le terminal jusqu’à la passerelle d’embarquement. Une « contrainte » pour ces agents qui déchargent aussi les bagages prioritaires et en correspondance, alors que des fauteuils électriques peuvent peser 200 kilos.
…une mission « très compliquée »
« Quand il y a beaucoup de bagages, ce n’est pas évident d’affecter un conteneur à un fauteuil », commente Pierre Abraham, directeur adjoint de l’aéroport, alors que les athlètes italiens quittent le couloir d’embarquement dans leurs propres fauteuils, tout sourires. « On dépend des compagnies aériennes : si le fauteuil est mis à l’aéroport de départ ou de correspondance au milieu des bagages, c’est raté », explique Antoine Vigario. « Amener le fauteuil à la porte de l’avion, c’est un des sujets les plus compliqués, que très peu d’aéroports réussissent à faire », observe Augustin de Romanet, PDG du Groupe ADP.
Pratique courante en Amérique du Nord
Peu fréquente en Europe, la pratique est courante en Amérique du Nord, où des passagers qui jugent le service inapproprié peuvent faire appel à des avocats et obtenir des dédommagements. D’autres efforts ont été faits pour les para athlètes, comme l’enregistrement des bagages et fauteuils directement au village olympique par Air France, qui les convoiera jusqu’à l’aéroport.
6 salles de changes
Certaines personnes lourdement handicapées ont besoin de toilettes particulières, appelées « salles de change ». Six ont été ouvertes à Roissy et deux à Orly : d’une douzaine de mètres carrés, ces toilettes publiques sont équipées d’une table de change et d’un lève-personne. Onéreuses – chaque module coûte 230 000 euros -, elles sont rares en France, davantage développées en Grande-Bretagne : leur nombre est ainsi porté à une dizaine au plan national.
Personnel formé et espaces canins
Pour les Jeux, des espaces canins ont été aménagés pour les chiens guides dans les aéroports d’Orly et Roissy, et tous les personnels ont été formés à l’accueil de ces publics. « Quand une personne arrive en fauteuil, on tend à parler à son accompagnant. Tous les agents ont été formés pour s’adresser directement à la personne dans le fauteuil », observe la ministre française, démissionnaire, en charge des Personnes handicapées, Fadila Khattabi.
Dignité humaine et argument commercial
Ces dispositifs seront-il pérennisés après les Jeux? « Dans les pays occidentaux vieillissants, nos aînés auront aussi besoin de voyager dans de bonnes conditions », juge-t-elle. C’est « une question de droit, de dignité humaine », mais aussi un « argument commercial » pour les compagnies aériennes. Environ 10 % des 100 millions de passagers qui transitent par les aéroports de Paris chaque année ont un handicap, physique, auditif, sensoriel, selon M. de Romanet, le patron de Groupe ADP.
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