la recherche de terrain sur le handicap!

décembre 10, 2024 / Comments (0)

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Charles Gardou est le nouveau président de la Fondation internationale de recherche appliquée sur le handicap (Firah). Quel est son objectif ? Comment fonctionne-t-elle ? Cet anthropologue, spécialiste de la diversité, présente sa petite protégée.

La Fondation internationale de recherche appliquée sur le handicap (Firah) se dote d’un nouveau président. Charles Gardou, anthropologue et professeur émérite à l’Université Lumière Lyon 2, a été élu le 25 octobre 2024, succédant ainsi à Patrick Gohet.

Auteur, spécialiste de la diversité

Il a notamment fondé et dirige la collection « Connaissances de la diversité » aux éditions Érès, qui rassemble aujourd’hui près de 100 ouvrages, et il est lui-même l’auteur d’une vingtaine de livres. L’ensemble de ses recherches et publications atteste de l’importance qu’il accorde à la collaboration entre chercheurs, personnes directement concernées, aidants et professionnels, de même qu’à la collaboration interculturelle. Un mois après son élection, ce chevalier de la Légion d’honneur expose ses ambitions et revient en détail sur le rôle de la Firah dans une interview « appliquée ».

Handicap.fr : Quel est l’objectif de la Fondation internationale de recherche appliquée sur le handicap et quelle est sa valeur ajoutée ? 

Charles Gardou : Permettez-moi d’abord un bref rappel : la Firah fut créée en 2009, à l’initiative d’APF France Handicap, de l’APAJJH et de NEXEM et présidée initialement par Axel Kahn (ndlr : scientifique et médecin généticien). Elle obtint deux ans plus tard la reconnaissance d’utilité publique. Son objectif : mettre la recherche au service de l’amélioration de la qualité de vie des personnes en situation de handicap, de leur participation sociale, de l’effectivité de leurs droits et, à cette fin, conjuguer diverses formes d’expertise : celle des personnes concernées, des familles, des aidants ou accompagnants, celle des acteurs associatifs et des professionnels, mais aussi des chercheurs. Dit autrement, elle vise à dépasser le compartimentage, culturellement entretenu, entre le monde de la recherche de celui des réalités et des pratiques concrètes. C’est bien là que réside sa plus-value. 

H.fr : Comment définir la recherche appliquée sur le handicap ?

CG : Deux points essentiels : d’une part, la recherche appliquée obéit aux règles habituelles de toute recherche qui se veut scientifique ; d’autre part, elle vise la production, par des démarches participatives, de connaissances utiles et d’outils utilisables en réponse aux empêchements liés aux situations de handicap, quelles que soient leur source. Ce qui suppose des problématiques émanant du terrain, des processus de recherche réellement collaboratifs et des méthodologies ajustées. D’où le choix de la Firah de soutenir et accompagner les recherches élaborant des supports d’application permettant de s’emparer des connaissances produites et de les opérationnaliser. En vous répondant, je pense à ce que disait Gaston Bachelard, me semble-t-il : « On ne doit pas s’accorder le droit de parler d’une connaissance qui ne serait pas communicable ». Dans le domaine qui nous préoccupe, je me permets d’ajouter « et qui ne serait pas exploitable ou transférable ».

H.fr : Quelques exemples de recherches en cours ou à venir ?

CG : Je m’en tiendrai à deux exemples. Le premier concerne des recherches en cours sur les troubles psychiques, dont deux, prochainement soutenues, apporteront leur pierre à une meilleure prise en compte des difficultés de santé mentale, Grande cause nationale 2025 (Santé mentale, grande cause 2025: sujet sous-estimé et tabou). Le deuxième a trait à des recherches, déjà réalisées et en voie d’achèvement, portant sur l’emploi des personnes en situation de handicap. La semaine européenne dédiée (SEEPH) (ndlr : qui s’est tenue du 18 au 24 novembre 2024) est là pour souligner le chemin encore à parcourir en la matière.

H.fr :  Comment résumer les activités de la Firah ?

CG : D’abord, elle soutient, accompagne et valorise, de manière opérationnelle, des recherches répondant aux caractéristiques que je viens de présenter, à savoir émanant du terrain et au profit du terrain. Ensuite, elle offre un étayage pour le transfert des connaissances issues de la recherche auprès des personnes vivant le handicap au quotidien ou œuvrant à leurs côtés. Certaines recherches adressent également des recommandations afin de faire évoluer les politiques publiques. Enfin, la Fondation opère, dans le cadre d’un programme spécifique, un accompagnement concret et in situ au transfert des innovations sociales. 

H.fr : Comment fonctionne-t-elle ? 

CG : Elle repose sur trois instances : un conseil d’administration, un comité éthique et scientifique, chargé d’évaluer les projets déposés dans le cadre des appels à projets – les prochains appels à projets seront d’ailleurs lancés en janvier 2025 – et un comité des amis de la Fondation qui contribue à faire connaître les productions et à apporter des fonds qui permettent de doter les recherches sélectionnées.

H.fr : En tant que nouveau président, quelles sont vos ambitions ?

CG : Je vous répondrai d’abord que la sollicitation qui m’a été faite par les fondateurs de la Firah m’honore et m’oblige. Je n’étais pas préparé à la recevoir au moment où elle m’est parvenue, mais il est vrai que la fonction qui m’est confiée s’inscrit en continuité avec mon parcours, où j’ai fait des situations vécues l’épicentre de mes travaux et publications. La recherche appliquée et participative ne m’est pas étrangère, loin s’en faut !

Concernant mes « ambitions », sans recourir à ce mot, je vous dirai que, dans le respect de l’idée qui, il y a 15 ans, a guidé les fondateurs, je m’attacherai, entre autres, à multiplier les liens, avec l’ensemble des acteurs, investis – ou désireux de s’investir – en matière de recherche appliquée et à développer, autant que faire se peut, les coopérations internationales, dimension qui, par expérience et par inclination anthropologique, me tenir à cœur. Sur ce point, comme sur les autres, je sais pouvoir compter sur les compétences et l’engagement de l’équipe en place autour de Philippe Chervin, secrétaire général. 

H.fr : Enfin, la Firah véhicule-t-elle la vision inclusive qui vous est chère ?

CG : La réponse m’est dictée par ce qui constitue l’essence même de la recherche appliquée, telle que prônée et soutenue par cette Fondation. Elle est inclusive en ce qu’elle bouscule une conception de la recherche conçue comme l’exclusivité des seuls chercheurs. Son objectif et sa philosophie sont, de fait, en étroite cohérence avec les textes, règles et engagements nationaux ou internationaux, parmi lesquels la Convention Internationale de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées, signée par la France en 2007 et ratifiée en 2010, dont l’optique inclusive constitue le cœur même.

© Clotilde Costil

« Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Cassandre Rogeret, journaliste Handicap.fr »


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